Le paon est un oiseau dont le plumage a souvent inspiré décorateurs et couturiers. Ou plus exactement son pennage, des plumes de même âge, car, comme tous les gallinacés, le paon mue chaque année entre août et octobre. Ses plumes tombent alors, que chacun peut ramasser et utiliser en bouquet isolé, dans des compositions florales, en accessoire de mode ou ornement décoratif.
Si Dame Paonne a des plumes assez quelconques, la queue trainante de Monsieur Paon comprend plus d’une centaine de plumes irisées, bleues, blanches ou marron selon l’espèce, d’un bon mètre de long. Le voir faire la roue est un spectacle magnifique. La bête étale ses plumes ornées de tâches en forme d’yeux, appelées ocelles, cherchant à séduire ou impressionner ses congénères.
Un oiseau vaniteux ?
Avec toutes ces qualités, il était évident qu’il taperait dans l’œil des artistes, peintres et poètes, qui noteraient ses belles plumes et son derrière à nu, en profitant pour se moquer du bel oiseau un brin vaniteux ! Vaniteux, vraiment ?
En faisant la roue, cet oiseau,
Dont le pennage traîne à terre,
Apparaît encore plus beau,
Mais se découvre le derrière.
- Le Paon. Guillaume Apollinaire, Le Bestiaire, ou Cortège d’Orphée, 1911
On peut lire dans la thèse de doctorat en histoire de l’art médiéval de Raphaël Demès, Autour du paon et du phénix. Étude d’une iconographie cultuelle et funéraire dans le Bassin méditerranéen (IVe-XIIe siècles) que « s’il est le plus souvent associé à l’orgueil, à la vanité et à la superficialité, la signification de cet oiseau était tout autre au Moyen Âge. Avant le XIIe siècle, l’oiseau était attaché au thème de la renaissance, un processus également inscrit au cœur du mythe du phénix. Ce dernier, unique représentant de son espèce, est lié aujourd’hui encore à la cyclicité, à la régénération par le feu et à la résurrection. Il réapparaît régulièrement dans l’art et la littérature sous la forme d’un rapace aux plumes flamboyantes, bien que cette image soit assez rare dans l’iconographie antique et médiévale. »* Les prélats et les grands seigneurs portaient alors des chapeaux ornés, peut-être même formés, de plumes de paon.
Des plumes à chapeaux
Au XIIe siècle, la consommation de plumes à chapeaux était assez grande « pour faire vivre une corporation, celle des chapeliers de paon qui, vers 1268, présenta ses statuts à l’homologation du prévôt de Paris. Les chapeliers de paon prirent vers le XVe siècle le nom de plumassiers. Aux termes de leurs statuts, les plumassiers avaient le droit de confectionner « toutes sortes d’habillemens de tête », panaches, chapeaux et bonnets de mascarades, bouquets pour églises, toques, aigrettes, guirlandes pour carrousels, ballets et courses de bagues ; ils pouvaient teindre toutes espèces de plumes en toutes couleurs, les enrichir et enjoliver d’or et d’argent vrai ou faux. Ils employaient surtout les plumes d’autruche, de héron, de coq, d’oie, de vautour, de paon et de geai. » (Wikipedia)
La protection des oiseaux
A la Belle Époque, devant l’augmentation de la demande de plumes provenant d’espèces de plus en plus menacées, des associations et des naturalistes prennent la défense des volatiles et s’organisent pour lutter contre la chasse. La Royal Society for the Protection of Birds ( Société royale pour la protection des oiseaux) est fondée en Angleterre en 1889 pour faire campagne contre le « commerce barbare de plumes pour les chapeaux des femmes ». A la fin du XIXe siècle, à Paris par exemple, on comptait en effet, près de huit-cents maisons qui employaient six à sept mille personnes. La quantité de travail était telle que les plumassiers ne s’occupaient que d’une catégorie de plume à la fois ; l’un s’occupant de la plume d’autruche blanche, l’autre de la noire, d’autres de la teindre de couleurs vives (wikipedia) .
Aujourd’hui, les plumassiers utilisent les plumes d’espèces comestibles (coq, faisan, autruche, pintade…) non protégées ou issues de vieux stocks. Et ce sont « les danseuses de music-hall avec leur « truc en plume », ou les mannequins lors des défilés de haute couture, qui sont désormais les seules à arborer de telles créations, souvent ostentatoires. Les femmes de la rue ne se parent plus de plumes. La plume d’ornement a été largement supplantée par la plume de spectacle, insolente et érotique », rappelle Anne Monjaret, dans son article « Plume et mode à la Belle Époque – Les plumassiers parisiens face à la question animale ». **
Un motif graphique
A défaut d’employer des plumes de paon, le motif de la longue penne à ocelle a séduit les décorateurs de l’Art nouveau. On le trouve notamment sur la lampe Peacock (1905) de la verrerie de Louis Comfort Tiffany (le fils de Charles Lewis Tiffany, fondateur de la bijouterie Tiffany & Co) qui en fera un motif récurrent. Avec la redécouverte de ce style unique et ornemental, la parure du paon suscite de nouveau l’intérêt.
Un truc en plume de paon
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Tissu Tiger & Peacock – Sveta_aho // Spoonflower
- Papier peint Shan Art Déco, inspiré d’un modèle original des années 1930 // Isidore Leroy
- Abat-jour Peacock Feathers Mindthegap // Etoffe
- Tissu Rousseau Clarke and Clarke // Etoffe
- Lustre Century 8-Light Candle Style Empire Chandelier // Perigold
- Nappe PEACOCK TABLECLOTH // Matthew Williamson
- Tissu coton épais imprimé plumes de paon bleu // Mondial Tissus
- Canapé 2 places en velours Marsile // AM.PM
En savoir +
- * Raphaël Demès, « Autour du paon et du phénix. Étude d’une iconographie cultuelle et funéraire dans le Bassin méditerranéen (ive-xiie siècles) », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA [En ligne], 22.2 | 2018
URL : http://journals.openedition.org/cem/15911 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cem.15911 - ** Anne Monjaret, « Plume et mode à la Belle Époque », Techniques & Culture [En ligne], 50 | 2008
URL : http://journals.openedition.org/tc/3952 ; DOI : https://doi.org/10.4000/tc.3952 - La traîne du paon : un réel handicap ? // Zoom Nature
- La plumasserie sur Wikipedia