Il existe dans l’état américain d’Alabama un village où les femmes noires, filles et descendantes d’esclaves, ont commencé à coudre des quilts dans les années 20. Là, dans cette pauvre commune rurale de Gees’s Bend d’une centaine d’habitants cernée par la rivière Alabama, ces femmes ont produit des centaines de patchworks sans avoir jamais appris aucune technique mais en ayant observé la façon dont leur mère ou leur grand-mère tirait l’aiguille.
« Petite fille, la quilteuse Arlonzia Pettway regardait sa grand-mère Sally et sa mère, Missouri, coudre des quilts. Et elle écoutait leurs histoires, nombreuses à propos de Dinah Miller, qui avait été amenée aux Etats-Unis sur un navire négrier en 1859 et vendue pour 1O cents » :
As a girl, [Arlonzia] Pettway Pettway would watch her grandmother, Sally, and her mother, Missouri, piecing quilts. And she would listen to their stories, many of them about Dinah Miller, who had been brought to the United States in a slave ship in 1859. « My great-grandmother Dinah was sold for a dime, » Pettway said. « Her dad, brother and mother were sold to different people, and she didn’t see them no more. My great-grandfather was a Cherokee Indian. Dinah was made to sleep with this big Indian like you stud your cow…. You couldn’t have no skinny children working on your slave master’s farm. » In addition to Pettway, some 20 other Gee’s Bend quiltmakers are Dinah’s descendants.¹
On dit que les motifs et les combinaisons de couleurs uniques de ces patchworks tirent leur influence des textiles africains. Ils seraient les plus importantes contributions à l’histoire de l’art des Etats-Unis des Afro-Américains.
The quilting tradition in Gee’s Bend goes back to the 19th century Perhaps influenced in part by patterned African textiles, female slaves pieced together strips of cloth to make bedcovers. Throughout the post-bellum years and into the 20th century, Gee’s Bend women made quilts to keep themselves and their children warm in unheated shacks that lacked running water, telephones and electricity. Along the way they developed a distinctive style, noted for its lively improvisations and geometric simplicity.¹
La tradition du quilting à Gee’s Bend remonte au 19e siècle, lorsque le village était sur la plantation de coton du propriétaire Joseph Gee. Les femmes esclaves ont commencé à coudre des couvre-lits pour se réchauffer et réchauffer leurs enfants dans des cahutes sans chauffage, sans eau courante, sans électricité ou téléphone dans lesquelles elles ont continué à vivre jusqu’à la première moitié du 20e siècle.³
- En 1845, la plantation est vendue à Mark H. Pettway. Après l’émancipation, les anciens esclaves restent sur les plantations comme ouvriers agricoles, fermiers ou métayers. La plantation est revendue à la famille Van de Graaff.
- Dans les années 30, un marchand, créditeur de nombreux habitants du village meurt et sa famille solde les crédits en prenant les animaux, les outils, la nourriture des débiteurs pour rembourser les dettes.
- Grâce à l’aide de la Croix Rouge et au maintien bon marché des loyers, la population ne sombre pas totalement. Les terres sont ensuite transformées en une coopérative, un projet pilote à l’initiative du gouvernement fédéral et de la Farm Security Administration, qui seront revendues aux familles de Gee’s Bend. ²
Le recyclage des petits bouts de tissus par cette communauté a donné lieu à des créations textiles de premier plan.
Jusque dans les années 50s, les quilts étaient essentiellement faits à partir de vieux t-shirts, tabliers, napperons ou robes ainsi qu’avec des morceaux de denim. Les créations portent la signature de leurs auteurs mais également l’influence d’une communauté créative géographiquement isolée qui a vu plusieurs générations de femmes coudre et se transmettre des savoir-faire ancestraux.
- Images via Souls Grown Deep – Photo: Stephen Pitkin/Pitkin Studio
La Tinwood Alliance, une ONG supportant l’art Afro-Américain a répertorié les quilts pendant 4 ans, organisé l’exposition “The Quilts of Gee’s Bend” et a publié plusieurs ouvrages sur ce travail.
- Gee’s Bend: The Architecture Of The Quilt // Tinwood Books
- Mary Lee Bendolph, Gee’s Bend Quilts, And Beyond // Tinwood Books
En savoir +
- La fondation Souls Grown Deep est une fondation indépendante dédiée au travail des artistes autodidactes Afro-Américains.
- Les quilts de Gee’s Bend ont été exposés entre autres au Museum of Fine Arts, Houston, à l’Indianapolis Museum of Art, au Philadelphia Museum of Art et au Whitney Museum of American Art.
Références
- Fabric of Their Lives // Smithsonian institute
- « THE HISTORY OF GEE’S BEND, ALABAMA », Article by Kyes Stephens – Alabama Online Encyclopedia à lire sur le site de l’université d’Auburn, Alabama.
Merci pour cet article instructif , je suis passionnée d’art textiles et en particulier de patchwork,( et descendante d’esclaves des Antilles , alors ça me parle ! )
Il y a eu récemment sur Arte un documentaire sur les artistes ( peintres ) afro-américains
http://www.arte.tv/guide/fr/066342-000-A/noire-est-la-couleur
Bénédicte / https://bilidine.blogspot.fr/
Pareil et pareil ^_¨ Merci pour le lien. Bonne journée
Hooo du patch et du textile ! Tout ce qui me passionne, m’interpelle !
Si on s’y interesse de près, on découvre aussi l’art de vivre des anciens colons et autres peuples migrateurs !
merci !
De rien ! Merci de nous suivre. Bonne soirée à vous 🙂
Avez-vous lu La Porte du ciel de Dominique Fortier chez Escales?
Non. Je devrais. Je vais. Je viens de l’acheter en kindle. Merci !
« Il est un autre moyen de sortir d’un labyrinthe :
c’est d’inventer soi-même le chemin au fur et à mesure,
jusqu’à la sortie, que l’on invente aussi. »